Les meilleus chefs de Barcelone

Si Barcelone n’a pas toujours été célèbre pour sa cuisine, la ville a effectué un virage à 180 degrés en la matière. Si Madrid reste la ville gastronomique la mieux équipée d’Espagne, Barcelone a pour elle la Méditerranée, des fruits et du poisson frais, en plus d’une cuisine traditionnelle avec une personnalité et une âme. Et la capitale catalane fait aussi un sérieux effort pour marcher au rythme des dernières tendances de la mode à Londres et à New York, des pop-ups aux soupers-clubs. La cuisine gastronomique s’y ouvre désormais à un registre différent : fast-food incroyable, cuisine bistro… Du pain à la bière, l’accent est mis sur les valeurs artisanales et la qualité toujours plus élevée. Pour ne pas passer à côté de ce que la ville a de mieux à offrir en la matière, voici six chefs incontournables à découvrir absolument lors d’un séjour à « Barca ».

Albert Adria : le chef aux mille cordes
Les Adrias sont deux frères issus d’une famille ouvrière qui a grandi dans la banlieue tumultueuse de Llobregat et qui, à force de génétique et d’une extraordinaire capacité de travail, ont fini au sommet de leur arbre. Ferran est l’inventeur suprême, l’initiateur, le nom mondial. Albert, le restaurateur le plus prospère de Barcelone et l’un des chefs pâtissiers les plus influents du monde, est également très respecté. Il est tentant de comparer son succès à celui de son frère aîné : ils ont des styles conversationnels semblables à ceux d’une mitraillette et une énergie agitée. Mais bien que Ferran soit un génie créateur, on ne peut pas dire qu’il ait le sens commercial d’Albert. L’homme ne cesse d’ouvrir de nouveaux établissements, toujours d’une extrême qualité : le 41 Degrees, un bar à cocktail très chargé avec des snacks Bulli-esques ; Bodega 1900, qui prend la culture de l’apéritif catalan et fonctionne avec elle ; l’incroyable Tickets, où l’accent est autant mis sur la nourriture que sur l’hospitalité ; Hoja Santa aux saveurs mexicaines ; Niño Viejo et ses tacos ; Heart Ibiza, sa folle aventure avec Ferran et le fondateur du Cirque du Soleil ; Enigma et son multi-espace de 700 mètres carrés ; et, bien sûr, Pakta, spécialisée dans la fusion péruvienne-japonaise et qui a remporté une étoile Michelin, : on y déguste sashimi et algues et ceviche et sandwichitos – parfois tous sur la même assiette. Cela fonctionne comme un charme.

Nandu Jubany : le champion du terroir
Sous la direction de Fermi Puig, Petit Comité était déjà une référence fiable pour les classiques tels que esqueixada (salade de morue) et fricandó (ragoût de bœuf et de champignons). Mais Nandu Jubany, héritier d’une famille propriétaire de restaurant dans la ville de Vic où les saveurs sont aussi riches et terreuses que le paysage, l’a encore fait grimper de plusieurs crans en matière de qualité. Le restaurant a l’air plus élégant que jamais ; les touches vaguement japonaises dans la conception ont été supprimées, et il y a maintenant un bar au niveau de la rue servant les propres tapas de Jubany. Le chef lui-même est rond et souriant, amical et terre-à-terre, mais sa bonne humeur masque un professionnalisme féroce. Au cours des dernières années, il a joué un rôle de consultant dans les cuisines de l’Hôtel Majestic, où le menu du brunch et du bar porte désormais l’empreinte de sa forte personnalité culinaire. A la fois à l’hôtel et au Petit Comité (groupe Majestic), sa loyauté à la cuisine catalane est évidente.
Le menu de saison à cinq plats du Comité constitue en soi une visite du terroir. Le lundi, il y a toujours un ragoût de légumineuses et de viandes mélangées ; le mercredi, l’épaisse soupe à la maison escudella i cam d’olla ; le jeudi, un authentique plat de riz régional; le vendredi, la morue salée, et le samedi « platos de la memoria » (« plats de la mémoire »), inspiré par les plus profondes traditions rurales, comme une oreille de cochon confit cuit dans sa propre graisse pendant 12 heures, tranché mince et croustillant sur les charbons.

Max et Stephano Colombo : Venise à Barcelone
Bien qu’on ne pense pas forcément à déguster de la nourriture italienne à Barcelone, il serait dommage de passer à côté de Xemei. Depuis son ouverture, ce restaurant s’est taillé une place parmi les lieux de restauration les plus appréciés de la ville. Sa configuration est étrange à bien des égards. Coincé à l’extrémité la plus grouillante de Poble Sec, c’est un mélange fou de meubles mal assortis, de bibelots ecclésiastiques et de murs griffonnés. L’homme barbu et tatoué qui apporte votre Campari et son soda ressemble plus à un bâtisseur qu’à un restaurateur respecté. Mais il s’agit de Stefano Colombo. Lui et son frère jumeau Max sont arrivés de Venise après des aventures dans le design industriel, l’architecture et les cuisines de restaurants. Ils proposent aujourd’hui une authentique cucina veneziana : un plat de calamars mijotés au vin rouge et à la menthe (servi avec des gnocchis) suggère que la cuisine de la Catalogne et de la Vénétie ne sont pas aussi éloignées l’une de l’autre qu’on ne le pense généralement.

Paco Perez : les saveurs de la mer, de la montagne, et de l’arrière-pays
Le chef Paco Perez vient de Llançà, un petit village de la Costa Brava. Ce chef prodigieusement talentueux possède des restaurants étoilés Michelin à Berlin, Barcelone… et ce petit village de la Costa Brava. Le Miramar a maintenant deux étoiles au Michelin, tout comme le QG de Perez à Barcelone, Enoteca à l’Hôtel Arts. Mais ses établissements étoilés ne sont pas les seuls qui méritent une visite : le restaurant de l’hôtel Mirror dans la rue Còrsega, Royale, sert ainsi les meilleurs burgers de Barcelone ; et L’Eggs propose un concept innovant où les plats sont tous basés sur l’oeuf.
L’Enoteca et sa salle à manger inondée de lumière méditerranéenne valent particulièrement le détour. Même si la cuisine très poussée de Pérez ne joue que sur les ingrédients fins (truffe noire, foie gras, œufs d’oursin, crevettes du Cap de Creus), elle ne semble jamais pompeuse ni trop indulgente. Ses racines catalanes sont évidentes, comme dans une superbe version de petits pois a la catalana, les petits pois sucrés brièvement sautés avec du panceta, saucisse butifarra rustique et bébé poulpe, et un canelón de poulet et de crevettes aux pattes noires qui résonne avec tradition saveur.

Jordi Cruz : tête d’affiche
Si un chef apparaît sur la couverture d’un magazine, ce n’est généralement pas pour ses pectoraux, ses abdominaux et ses abdominaux. Jordi Cruz, le porte-affiche de la nouvelle génération de cuisiniers espagnols, est une exception notable en la matière. Il a été flatté par les médias depuis son passage en tant que membre du panel sur MasterChef Espagne et sa couverture topless pour la santé des hommes a banni pour toujours l’idée qu’un chef typique est un homme d’âge moyen, pâle et en surpoids. Les restaurants de Cruz n’ont pas souffert de sa gloire fulgurante. Il en a trois à Barcelone. L’un est un bar à tapas adulte et très recommandable appelé Ten’s. Son restaurant phare est AbaC, récipiendaire de deux étoiles Michelin. Puis il y a Angle, un restaurant de l’Eixample qui n’a jamais reçu la publicité qu’il mérite (c’est l’un des meilleurs de la ville et on y trouve le meilleur rapport qualité-prix).